Cour des Miracles, Rue de Reuilly, XVIIe siècle.

Eriol, le voleur rentrait avec deux sacs de sa quêtes triomphante, en souriant. Du haut de ses un mètre quatre vingt pour vingt-deux ans, le jeune homme avait toujours excellé en la matière. Ayant appris à se faire discret, dès son plus jeune âge pour réussir à survivre, il n'avait guère de remord pour les actes qu'il accomplissait. Le garçon à l'âme d'un poète morbide, il mettait tous ses écrits en pratique, en souriant, toujours du sourire d'un ange. Il s'assit contre un mur et sortit un saucisson qu'il entama.
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Eléonor descendit en courant les escaliers du château pour rendre visite à blanche. Courant dans sa robe bleutée, on pouvait entendre du haut des escaliers sa servante l'appeler.
"Mademoiselle ! Mademoiselle !"
Eléonor continuait de courir, jusqu'a quitter la cour.

Non loin, dans un coin isolé, une jeune fille, vêtue d'une longue robe d'un verdâtre pâle, un châle sur les épaules, observaient de ses grands yeux noirs vides les gens qui venaient et partaient. Devant elle se trouvait un petit gobelet, dans lequel trônaient, solitaires, déjà quelques pièces. Pauvre prostituée de même pas encore une vingtaine d'année, elle espèrait, jour et nuit, qu'à un moment ou un autre, cette soit disant cour des miracle lui accorde à elle aussi une maigre intention et la libère de sa vie de rien.



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Non loin de cette même cour, les mains dans les poches, le Prince Raphaël marchait lentement. Une simple chemise blanche, et un pantalon marine, voilà de quoi il était affublé. Sa vie de roi, il ne la supportait plus guère. Petit, il n'avait encore pas toutes ces résponsabilités et obligations sur le dos ; il pouvait s'amuser, jouer, courrir, ne penser à rien. Mais les temps ont bien changés. C'est donc pour cela, que parfois, il aime s'évader et partir, peu importe où. Du moment qu'il n'y a personne pour le couvrir de remarques ou de regards comme "Ho, c'est le Prince ! Regardez, tous !". Il part souvent dans les champs, les contrées, les fôrets. Ou bien encore les cours des miracles. Pas toutes, c'est sûr, mais principalement celle de Reuilly. Les gens sont différents, ici, trouvaient-ils. Ils n'avaient rien, ils n'avaient personne. Et ils pouvaient s'avérer de bonne compagnie.

"Bonjour, Blanche." Dit-il en s'approchant de la jeune fille aux longs cheveux d'un blanc épuré, qui contrastaient parfaitement avec ses yeux d'un rouge sang.

Eriol, attiré par la curiosité remarqua une jeune fille. Même si il était un pilleur, il ne tuait personne, et n'aimait guère la souffrance. Il était un peu comme Robin des bois, il volait aux riches pour donner aux pauvres. Il se rendit donc vers cette demoiselle et lui donna un morceau de pain et de fromage.
"Mange donc pour aujourd'hui et ne pratique plus cela pour le moment."
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Elle leva les yeux vers cet homme, elle l'aimait bien et en même temps le haïssait, elle ne savait pas qui il était, mais savait qu'il ne faisait pas partit des "leurs."
"Bonjour Raphaël." répondit-elle comme à son habitude sèchement.

Levant son tendre visage, qui avaient encore gardés des traits d'enfants, la jeune demoiselle aux longs cheveux d'un blonds foncés posa ses prunelles sur Eriol. Elle le connaissait, bien sûr, comme beaucoup d'ici. Certains le détestaient, déjà pour son physique que qu'agréable, mais pour aussi ce côté "gentil", si l'on peut dire. Elle prit le pain et le fromage de ses mains sales, et le remercia doucement. Elle voulut lui adresser ne serait-ce qu'un léger sourire, mais trop timide pour cela, elle n'y parvint, et se contenta de baisser la tête.



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C'est sur, Raphaël ne faisait pas partit des leurs. Aussi, ceux qui savaient qui il était réellement, se devait, sous la demande personnelle du jeune homme, en garder le secret. Seulement dans des endroits pareils, il pouvait être autre chose que Le Prince. Il était juste Raphaël.

Il s'assit alors à même le sol, aux côtés de Blanche, et lui adressa un sourire simple mais chaleureux. Il était habitué à son ton toujours aussi sec et désagréable, mais ne relevait jamais, et se contentait de la regarder, lui arrangeant parfois, tendrement, une méche de ses cheveux d'une couleur peu commune qui lui barraient le visage.

Eriol s'accroupit et posa quelques pièces dans le verre de la demoiselle avant de lui poser sa veste sur ses épaules et lui tendit la main.
"Viens avec moi !"
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Arrivant telle une folle, Eléonor se jeta dans les bras de Blanche.
"Blaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaanche !" s'exclama-t-elle en souriant.
Gardant son air impassible, la demoiselle aux cheveux blancs passa ses mains dans les dos de la blondinette et la serra contre elle.

Ses joues s'empourprèrement légèrement, et, après un instant, enfourrant délicatement la nourriture et les pièces dans sa poche, elle lui prit doucement la main, et le remercia encore une fois, d'une petite voix presque inaudible.



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Le jeune homme regarda la scène, sans rien dire, quoique un peu amusé, vu le sourire collé à ses lèvres.

Eriol lui sourit de nouveau et l'emmena près de son refuge.
"Mange donc !"

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Eléonor donna une bourse à Blanche ainsi que de la nourriture et remarqua Raphaël.
"Raphaëlllllllllllllll !" s'exclama-t-elle en lui sautant au cou à lui aussi.

Elle semblait murmurer quelque chose qui ressemblait à un "oui" timide, et après avoir pris la nourriture de ses mains légèrement tremblantes, la jolie blondinette mangea sans un mot.



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Raphaël, qui était resté au sol, s'était juste relevé un peu, et n'ayant pas le temps de se mettre entièrement sur pied et en équilibre, tombea avec Eléonor dans les bras, manquant de se cogner la tête contre le mur derrière lui...

Eriol l'assit dans son refuge et alluma un feu, pour essayer de la réchauffer, le temps était très frais en ce moment, l'hiver arrivait.
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Eleonor avait eut le réflexe de mettre ses mains derrière la tête de Raphaël pour ne pas qu'il se cogne.

"Vous... Vous vous appellez comment ?" Demanda soudain la jeune fille, ayant finit de manger et tenant maintenant de ses maigres doigts la veste sur ses épaules frêles.



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Raphaël, lui, avait passé ses bras autour de la taile d'Eléonor, par réflèxe, ce qui fit au final une scène pour le moins douteuse : Le Prince par terre, tenant la demoiselle, et elle sur lui, entre ses jambes.

"Appelle-moi Eriol." répondit-il en se réchauffant et en lui tendant de la viande.
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Blanche les regarda et sourit discrètement, Eléonor était la seule personne qui arrivait à la faire sourire par sa joie de vivre même pendant son passé de prostituée.

Même si elle connaissait déjà son nom, elle le lui demanda tout de même, histoire de dire quelque chose et ne pas passer pour une fille qui ne parle jamais...

"Moi c'est Ilda. Enchantée..." Dit-elle tout en refusant polimment la viande. Elle avait assez mangé aujourd'hui, et même si elle pourrait encore avaler au moins dix agneaux, tous savait que la nourriture était précieuse et difficile à avoir, alors valait mieux ne pas la "gaspiller".



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Le jeune homme la regarda au début, puis, ayant compris ce qui venait de se passer, éclata d'un franc rire clair, amusé.

"Vraiment ? Tu n'as pas trouvé d'autre point de rendez-vous qu'ici ?
- Est-ce que j'ai l'air de connaître Paris ? La seule raison pour laquelle je t'ai fait venir ici c'est parce que j'ai entendu parler de cet endroit dans un livre. C'est tout. "
*Le grand homme sur son cheval noir poussa un long soupir exaspéré. Il détestait visiblement la Cour des Miracles, et il n'avait pas vraiment l'air de s'y sentir dans son élément, avec ses allures de grand seigneur. La personne à qui il parlait ressemblait à un très jeune homme avec une voix presque féminine. *

La nuit ne tombait pas encore, mais le soleil commencait déjà à se coucher sur cette Cour des Miracle, qui abritait plus d'un voleur, prostituée et bien d'autres encore... Oui, comme par exemple cette jeune fille aux cheveux d'un gris terne et aux yeux d'un vert émeraude. C'est à peine si on voyait ses pieds sous sa longue jupe aux couleurs de l'arc-en-ciel. De même pour sa veste à carreaux, qui lui cachait les mains, donnant presque l'illusion qu'elle en avait pas. Son étrange chapeau ornés de plumes dandinait sur sa tête au gré de ses mouvement ; faisaint passes les trois balles vieillis par le temps d'une main à l'autre, elle en rajouta une quatrième : il fallait croire qu'elle jonglait à merveille. Le sourire qu'elle affichait aux passants n'était pas celui que ceux de Reuilly étaient habitués à voir. Sur un gobelet posé au sol, certains lui jetaient des pièces alors que d'autres applaudissaient. Son oeil gauche était barré d'un trait vertical noir, alors que sous le droit, une sorte de goute était dessinnée.

Non, Dina n'était pas une voleuse, ni une prostituée ; elle gagnait sa croûte en divertisant ceux qui le voulait bien, et pas seulement par le jonglage.

"Quoi qu'il en soit, partons. J'en ai déjà assez.
- Regarde, une jongleuse ! Et si on allait voir ?
- Est-ce que tu m'as entendu ? "
*Apparemment, ce n'était pas le cas. Le plus jeune des deux était déjà parti rejoindre la foule pour applaudir la jeune femme qui se donnait en spectacle. Il admirait son costume qui semblait sortir d'un autre monde. L'homme au cheval semblait s'impatienter, mais il descendit de sa monture pour le rejoindre. *

Voyant un nouveau s'approcher, la jeune fille, qui n'avait apparament pas plus d'une seizaine d'année, reporta ses prunelles brillantes, sûrement par la fatigue mais aussi par la joie, sur les deux hommes. Leur adressant un sourire, elle sembla trop s'attarder sur eux, à tel point qu'elle en faillit faire tomber ses balles. Lâchant un petit "Ho !" de surprise, elle les rattrappa juste à temps et par la même occasion son chapeau -qui semblait tout aussi grand que sa tenue- avec le pied. Ne se pouvant permettre d'arrêter maintenant, elle resta sur un seul pied, pendant que sur l'autre pendait son couvre-chef. On put ainsi remarquer qu'elle était pieds-nus, mais ça ne paraissait pas la déranger pour autant.

*Le plus jeune des deux applaudit, émerveillé. La jongleuse était apparemment très douée, et avait un excellent équilibre. Il se mit à fouiller sa poche pour chercher quelques éventuelles pièces à lui donner. Il en trouva peu, mais ça suffisait, alors il les jeta à ses pieds, en faisant attention de ne pas la déconcentrer. *
"Ca va, tu t'es amusé ?
- Arrête, Anthelme. Le spectacle est pas encore terminé. On reste encore un peu ? "
*"Anthelme" soupira et acquiesça à contre-coeur. Il détestait qu'on l'appelle par son prénom, mais de toutes façons, il en avait marre de toujours lui répéter d'utiliser son nom de famille. *

Elle continua encore, puis, rangeant ses balles dans sa veste, elle en sortit par la occasion un paquet de cartes. Les mélangeant habilement, les faisaint passer d'une main à l'autre sans en faire tomber une seule, elle les plia ensuite en éventail, face contre sol, et, les placant devant les deux nouveaux arrivants, elle leur fit signer d'en tirer une.

"Ugh... Sans moi. "
*Anthelme détourna les yeux, tandis que l'autre observait les cartes, émerveillé. Elle était apparemment plus qu'une jongleuse, peut-être une magicienne ? Et peut-être qu'elle était tout un cirque à elle toute seule, qui sait. Il choisit une carte un peu à gauche, lui étant gaucher, il pensait que ça pouvait influer sur quelque chose. *

Elle parut un peu déçue que le plus grand refusa ; ça faisait lui faisait toujours un peu mal quand on lui refusait ce genre de choses. Mais voyant que le plus jeune les regardait, et s'aprêtait à en tirer une, elle retrouva son joyeux sourire et le regarda faire. Il tira une carte, elle l'a prit, la lui montra. Et alors que tous les yeux étaient braqués sur lui, elle fit soudain disparaître d'un geste rapide de la main la carte, sans même laisser aux spectateurs le loisir d'avoir entre'aperçu ne serait-ce si elle l'avait mise dans sa manche, dans sa veste, ou si elle l'avait remise dans le paquet. Amusée comme à chaque fois lorsqu'elle voyait tous ces yeux fascinés sur elle, elle laissa passer un moment de silence, prolongeant le doute et le suspens. Elle confia ses cartes à celui qui venait d'en tirer une du même jeu, secoua ses manches, enleva son chapeau, et montra même ses mains vides aux longs doigts blancs. Ensuite, s'approchant de celui aux airs de seigneur, et à qui elle avait entendue le nom mais ne s'en rappellait déjà pas, elle fronca les sourcils comme si elle avait vu quelque chose qui clochait sur sa veste, et, faisaint mine ne l'arranger, elle en sortit une carte, et la montra au jeune homme à côté pour avoir la confirmation que c'était bien celle qu'il avait tiré.

*Anthelme faisait de son mieux pour ne pas s'énerver. Il était en pleine concentration, et avait l'air calme, mais à l'intérieur de sa tête, c'était comme si le Vésuve était entré en éruption sans prévenir. Le plus jeune, dont on ne savait toujours pas le nom, était en train de retomber en enfance. Il s'agissait bien de sa carte, et il hocha la tête avec un grand sourire et des étoiles dans les yeux. Il essaya ensuite de se demander comment elle avait fait, en retraçant dans sa tête tous ses mouvements, sans trouver. *
"Daemon. On s'en va. Maintenant. Ma patience a des limites, tu sais. "
*"Daemon", du moins comme il semblait se nommer, regarda Anthelme d'un air déçu. Et en plus, il détestait qu'on l'appelle par son nom de famille. *

Dina, un peu surprise par l'autorité du plus vieux, se dit que ça devait être son père, ou alors son grand frère. S'éloignant un peu, elle rangea ses cartes et fit une petite réverance ; saluant tout le monde et les remerciant, elle leur rappella de revenir demain à la même heure, pour d'autres tours de ce genre. Certains d'entres eux lui dirent même "à toute à l'heure!", d'un ton presque impatient. Le soir, quand la nuit était déjà présente, c'était sans doute un des moments préfèrés de Dina : c'est là qu'elle inventait, à chaque fois, une histoire, qu'elle accompagnait de gestes théâtrals. Parfois, elles étaient hilarantes, d'autres fois poétiques et moralistes, ou bien encore à vous en faire pleurer. S'abaissant une dernière fois, elle leur fit à tous un sourire et soupira.

"Pourquoi est-ce que tu es aussi pressé ? Apparemment elle fait un autre spectacle tout à l'heure ! On pourra revenir ?
- Hors de question. J'ai un livre à terminer dont je meurs d'envie de savoir la suite.
- Gnagnagna, et "je suis le meilleur parce que je sais lire", et tu prends tes grands airs d'érudit. Rentre chez toi, je reste ici. "
*Anthelme prit le jeune homme par le col, ou plutôt le jabot, et mit son visage juste en face du sien, pour qu'il puisse bien lire sur ses lèvres ce qu'il allait lui dire. *
"Ecoute-moi bien, petit pirate de pacotille. Je ne suis pas venu à Paris en cette fin d'après-midi pour rien, sachant que si je repars seul, alors je vais devoir revenir demain pour te chercher. Je suis déjà assez gentil de t'héberger pendant un mois alors que je n'avais même pas envie de revoir ta tête. Maintenant, tu me suis, et tu te tais. "

Dina avait observé la scène, silencieuse. Le dos tout collé contre le mur, une idée lui traversa l'esprit, mais elle attendit encore. Ce n'était apparement ni son père, ni son frère, et sans doute pas un membre de sa famille...

Trippotant une mèche de ses cheveux grisés, la tête à présent baissé, elle attendait la suite.